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Pré-bilan du 49ème Festival du Cinéma Américain de Deauville et critique de MAY DECEMBER de Todd Haynes

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Une statue monumentale signée Louis Derbré surplombe désormais les planches de Deauville, témoignant de « la vision d'une porte toujours ouverte sur l'infini. » C'est plutôt une fenêtre ouverte sur la multiplicité des maux du Pays de l’Oncle Sam que nous proposaient les films de ce 49ème Festival du Cinéma Américain de Deauville.

 Une fois de plus, cette édition (et tout particulièrement par le truchement de ses films en compétition) fut une radiographie captivante, inventive, intrigante, surprenante et souvent déroutante, transcrivant les plaies d’une Amérique déboussolée, où errent des êtres esseulés, marginalisés, en quête de respiration, d’identité et d’échappatoires à une violence omniprésente.

 Il est amusant de constater que la lenteur (du film Runner) plus que la violence a heurté, brusqué et suscité un tel rejet des festivaliers comme si la vraie violence résidait là : dans le temps laissé à la réflexion, la porte ouverte sur l’imaginaire, pourtant salutaire.  

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En ce vendredi soir, c’est le très attendu May december de Todd Haynes, avec Natalie Portman et Julianne Moore, qui fut projeté au CID, dans le cadre des Premières.

Pour préparer son nouveau rôle, une actrice célèbre (Natalie Portman) vient rencontrer celle qu’elle va incarner à l’écran (Julianne Moore), dont la vie sentimentale a enflammé la presse à scandale et passionné le pays 20 ans plus tôt : son histoire avec un jeune adolescent alors qu’elle avait déjà dépassé la trentaine.

Ce film fut aussi présenté en compétition au Festival de Cannes 2023.

May-December est une expression qui désigne une relation au sein de laquelle les deux partenaires ont une grande différence d'âge.

Todd Haynes dirige ici pour la cinquième fois Julianne Moore après Safe, Loin du paradis, I'm not there et Le Musée des merveilles.

Le film est une adaptation très libre d’un fait divers. Les personnages n’ont pas les mêmes noms, ni les mêmes professions. Et l’arrivée de la comédienne dans leur vie est également totalement inventée. C'est Natalie Portman qui a envoyé à Todd Haynes le scénario de Samy Burch.

Le premier grand intérêt du film est la bande-originale qui reprend pour thème la partition que Michel Legrand avait composée pour Le Messager de Joseph Losey en 1971 (musique bien connue pour servir aussi de générique à l'émission Faites entrer l'accusé !).  Cette partition qui était au départ un outil de travail a finalement été gardée par le compositeur Marcelo Zarvos qui l’a utilisée en la réarrangeant.

Ce onzième film de Todd Haynes décontenance autant qu’il captive, est aussi simple en apparence qu’il est en réalité complexe. Derrière les façades lisses se terrent des secrets scandaleux.

Ce film délicat et complexe, subtilement dérangeant, au charme trouble nous envoûte progressivement, en nous dressant les portraits en miroir de ces deux femmes, une auscultation des faux-semblants, des ambiguïtés des âmes humaines, et des démons qui les hantent. Des moments troublants d’anthologie permettent aux deux actrices de livrer des prestations mémorables comme lorsque Elisabeth joue face caméra la lettre d’amour que Gracie avait écrite à son amant des années plus tôt.

Derrière l’élégance de la mise en scène, la finesse de l’écriture instille peu à peu le malaise dans ce jeu de miroirs et de mises en abyme, cette légèreté apparente révèle la gravité et la noirceur des âmes. Sans atteindre l’excellence de Carol et Loin du Paradis, un film dont le dénouement troublant et puissant, à l'image de ses personnages, nous accompagne bien après le générique de fin.

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