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COMPETITION OFFICIELLE (FESTIVAL CINEMA AMERICAIN) - Page 5

  • ALL IS LOST de J.C Chandor, en compétition, aujourd'hui, à Deauville : à ne pas manquer!

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    C'est lors du dernier Festival de Cannes où il était présenté en sélection officielle mais hors compétition que j'ai eu le plaisir de découvrir "All is lost" de J.C Chandor en présence de Robert Redford qui a également donné une conférence de presse dont je vous parle également ci-dessous et dont vous pourrez également retrouver quelques images. C'était un de mes coups de coeur de cette édition cannoise 2013 et il ne serait pas étonnant qu'il remporte les suffrages du jury du Festival du Cinéma Américain de Deauville en septembre. C'est en tout cas une excellente idée que de l'avoir sélectionné en compétition, il sera ainsi projeté cet après-midi à 15H. Je vous propose ci-dessous ma critique en attendant de vous parler de mes autres coups de cœur de la compétition, dans un premier compte-rendu, ce soir. Cette critique, ci-dessous, est également publiée dans le journal de l'ENA de juillet/août 2013 (en bas de cet article, cliquez ici pour une meilleure lisibilité de l'article en question).

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    All is lost est le deuxième film du réalisateur J.C Chandor après Margin Call, avec un unique interprète, et non des moindres, Robert Redford, dont la mythique présence a cette année illuminé la Croisette. Quel contraste  entre le vacarme, la foule cannois et le silence, la solitude de All is lost.

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     Lors de la conférence de presse cannoise, Robert Redford, a notamment parlé, avec autodérision et simplicité,  de son amour de la nature et de son inquiétude pour celle-ci, rappelant son engagement en faveur de l'environnement qu’il juge dans une  situation "carrément catastrophique, désastreuse".  "A mon avis, la planète essaie de nous parler", a-t-il ajouté, évoquant "les ouragans, les tremblements de terre et les tornades", deux jours après la tornade dévastatrice de Moore, près d'Oklahoma City. Il a aussi évoqué son envie de continuer  à jouer, de la difficulté de faire des films aujourd’hui. Il a évoqué le défi que représentait ce film pour lui : « C’est un défi qui m’a beaucoup attiré en tant qu’acteur. Je voulais me donner entièrement à un réalisateur ». Il a aussi abordé l’importance du silence « Je crois dans l’intérêt du silence au cinéma. Je crois aussi dans l’intérêt du silence dans la vie car on parle car on parle parfois trop. Si on arrive à faire passer le silence dans une forme artistique, c’est intéressant ». « Ce film est en plein contraste avec la société actuelle. On voit le temps qu’il fait, un bateau et un homme. C’est tout ». « Il y a évidemment des similitudes avec Jeremiah Johnson » a-t-il également répondu.

     

    Dans Jeremiah Johnson de Sydney Pollack, Robert Redford fuyait ainsi les hommes et la civilisation pour les hauteurs sauvages des montagnes Rocheuses. Ici, dans All is lost, au cours d’un voyage en solitaire dans l’Océan Indien, au large de Sumatra, à son réveil, il découvre que la coque de son voilier a été heurtée et endommagée par un container flottant à la dérive. Privé de sa radio, il doit affronter seul les éléments mais malgré toute sa force, sa détermination, son intelligence, son ingéniosité, il devra bientôt regarder la mort en face. Ici, aussi, c’est finalement la civilisation (incarnée par ce container rouge au milieu de l’horizon bleutée et qui transportait d’ailleurs des chaussures, incarnation de la société de consommation mondialisée ) qui le rattrape (alors que, peut-être, il voulait la fuir, nous ne le saurons jamais…), contraint à se retrouver ainsi « seul au monde », comme dans le film éponyme de Robert Zemeckis avec Tom Hanks, même si je lui préfère, et de loin, ce film de J.C Chandor.

    Pendant 1H45, il est en effet seul. Seul face à la folle et splendide violence des éléments. Seul face à nous. Seul face à lui-même. Seul face à l’Océan Indien à perte de vue. Seul face à la force des éléments et face à ses propres faiblesses. Seul face à la nature. Cela pourrait être ennuyeux…et c’est passionnant, palpitant, terrifiant, sublime, et parfois tout cela à la fois.

    Le seul «dialogue », est en réalité un monologue en ouverture du film, une sorte de testament qui s’écoute comme le roulement poétique, doux et violent, des vagues, et qui place ce qui va suivre sous le sceau de la fatalité : « Ici, tout est perdu, sauf le corps et l’âme ».

     

     Progressivement il va se voir dépouillé de ce qui constitue ses souvenirs, de tout ce qui constitue une chance de survie : radio, eau... Son monde va se rétrécir. La caméra va parfois l’enfermer dans son cadre renforçant le sentiment de violence implacable du fracas des éléments. Avec lui, impuissants, nous assistons au spectacle effrayant et fascinant du déchainement de la tempête et de ses tentatives pour y survivre et résister.

     

    Le choix du magnétique Robert Redford dans ce rôle renforce encore la force de la situation. Avec lui c’est toute une mythologie, cinématographique, américaine, qui est malmenée, bousculée, et qui tente de résister envers et contre tout, de trouver une solution jusqu’à l’ultime seconde. Symbole d’une Amérique soumise à des vents contraires, au fracas de la nature et de la réalité, et qui tente de résister, malgré tout.

     

     La mise en scène et la photographie sobre, soignée, épurée, le montre (et sans le moindre artifice de mise en scène ou flashback comme dans L’Odyssée de Pi) tantôt comme une sorte de Dieu/mythe dominant la nature (plusieurs plongées où sa silhouette se détache au milieu du ciel), ou comme un élément infime au milieu de l’Océan. La musique signée Alex Ebert (du groupe Edward Sharpe and the Magnetic Zeros) apporte une force supplémentaire à ces images d’une tristesse et d’une beauté mêlées d’une puissance dévastatrice. Inexistante au début du film, elle prend de l’ampleur a fur et à mesure que la tragédie se rapproche et qu’elle devient inéluctable, sans jamais être trop grandiloquente ou omniprésente.

     

    Certains plans sont d’une beauté à couper le souffle, comme ces requins en contre-plongée qui semblent danser, le défier et l’accompagner ou comme cette fin qui mélange les éléments, l’eau et le feu, le rêve et la réalité ou encore cette lune braquée sur lui comme un projecteur.

     

     Comme l’a souligné Robert Redford, il s’agit d’un « film presque existentiel qui laisse la place à l’interprétation du spectateur » et cela fait un bien fou de « regarder quelqu’un penser » pour reprendre les termes du producteur même si cette définition pourrait donner une image statique du film qui se suit au contraire comme un thriller.

     

    En conférence de presse, Robert Redford avait révélé ne pas avoir vu le film et qu’il allait le découvrir le même soir lors de la projection officielle cannoise dans le Grand Théâtre Lumière. On imagine aisément son émotion, à l’issue de cette heure quarante. Face à lui-même. Face à cette fable bouleversante d’une beauté crépusculaire

     

     All is lost a été présenté hors compétition du 66ème Festival de Cannes. Il aurait indéniablement eu sa place en compétition et peut-être même tout en haut du palmarès

     

  • 39ème Festival du Cinéma américain de Deauville - ALL IS LOST de J.C Chandor en compétition - Critique

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    C'est lors du dernier Festival de Cannes où il était présenté en sélection officielle mais hors compétition que j'ai eu le plaisir de découvrir "All is lost" de J.C Chandor en présence de Robert Redford qui a également donné une conférence de presse dont je vous parle également ci-dessous et dont vous pourrez également retrouver quelques images. C'était un de mes coups de coeur de cette édition cannoise 2013 et il ne serait pas étonnant qu'il remporte les suffrages du jury du Festival du Cinéma Américain de Deauville en septembre. C'est en tout cas une excellente idée que de l'avoir sélectionné en compétition. Cette critique, ci-dessous, sera également publiée dans le journal de l'ENA fin juillet, je vous en reparlerai...

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    All is lost est le deuxième film du réalisateur J.C Chandor après Margin Call, avec un unique interprète, et non des moindres, Robert Redford, dont la mythique présence a cette année illuminé la Croisette. Quel contraste  entre le vacarme, la foule cannois et le silence, la solitude de All is lost.

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     Lors de la conférence de presse cannoise, Robert Redford, a notamment parlé, avec autodérision et simplicité,  de son amour de la nature et de son inquiétude pour celle-ci, rappelant son engagement en faveur de l'environnement qu’il juge dans une  situation "carrément catastrophique, désastreuse".  "A mon avis, la planète essaie de nous parler", a-t-il ajouté, évoquant "les ouragans, les tremblements de terre et les tornades", deux jours après la tornade dévastatrice de Moore, près d'Oklahoma City. Il a aussi évoqué son envie de continuer  à jouer, de la difficulté de faire des films aujourd’hui. Il a évoqué le défi que représentait ce film pour lui : « C’est un défi qui m’a beaucoup attiré en tant qu’acteur. Je voulais me donner entièrement à un réalisateur ». Il a aussi abordé l’importance du silence « Je crois dans l’intérêt du silence au cinéma. Je crois aussi dans l’intérêt du silence dans la vie car on parle car on parle parfois trop. Si on arrive à faire passer le silence dans une forme artistique, c’est intéressant ». « Ce film est en plein contraste avec la société actuelle. On voit le temps qu’il fait, un bateau et un homme. C’est tout ». « Il y a évidemment des similitudes avec Jeremiah Johnson » a-t-il également répondu.

     

    Dans Jeremiah Johnson de Sydney Pollack, Robert Redford fuyait ainsi les hommes et la civilisation pour les hauteurs sauvages des montagnes Rocheuses. Ici, dans All is lost, au cours d’un voyage en solitaire dans l’Océan Indien, au large de Sumatra, à son réveil, il découvre que la coque de son voilier a été heurtée et endommagée par un container flottant à la dérive. Privé de sa radio, il doit affronter seul les éléments mais malgré toute sa force, sa détermination, son intelligence, son ingéniosité, il devra bientôt regarder la mort en face. Ici, aussi, c’est finalement la civilisation (incarnée par ce container rouge au milieu de l’horizon bleutée et qui transportait d’ailleurs des chaussures, incarnation de la société de consommation mondialisée ) qui le rattrape (alors que, peut-être, il voulait la fuir, nous ne le saurons jamais…), contraint à se retrouver ainsi « seul au monde », comme dans le film éponyme de Robert Zemeckis avec Tom Hanks, même si je lui préfère, et de loin, ce film de J.C Chandor.

    Pendant 1H45, il est en effet seul. Seul face à la folle et splendide violence des éléments. Seul face à nous. Seul face à lui-même. Seul face à l’Océan Indien à perte de vue. Seul face à la force des éléments et face à ses propres faiblesses. Seul face à la nature. Cela pourrait être ennuyeux…et c’est passionnant, palpitant, terrifiant, sublime, et parfois tout cela à la fois.

    Le seul «dialogue », est en réalité un monologue en ouverture du film, une sorte de testament qui s’écoute comme le roulement poétique, doux et violent, des vagues, et qui place ce qui va suivre sous le sceau de la fatalité : « Ici, tout est perdu, sauf le corps et l’âme ».

     

     Progressivement il va se voir dépouillé de ce qui constitue ses souvenirs, de tout ce qui constitue une chance de survie : radio, eau... Son monde va se rétrécir. La caméra va parfois l’enfermer dans son cadre renforçant le sentiment de violence implacable du fracas des éléments. Avec lui, impuissants, nous assistons au spectacle effrayant et fascinant du déchainement de la tempête et de ses tentatives pour y survivre et résister.

     

    Le choix du magnétique Robert Redford dans ce rôle renforce encore la force de la situation. Avec lui c’est toute une mythologie, cinématographique, américaine, qui est malmenée, bousculée, et qui tente de résister envers et contre tout, de trouver une solution jusqu’à l’ultime seconde. Symbole d’une Amérique soumise à des vents contraires, au fracas de la nature et de la réalité, et qui tente de résister, malgré tout.

     

     La mise en scène et la photographie sobre, soignée, épurée, le montre (et sans le moindre artifice de mise en scène ou flashback comme dans L’Odyssée de Pi) tantôt comme une sorte de Dieu/mythe dominant la nature (plusieurs plongées où sa silhouette se détache au milieu du ciel), ou comme un élément infime au milieu de l’Océan. La musique signée Alex Ebert (du groupe Edward Sharpe and the Magnetic Zeros) apporte une force supplémentaire à ces images d’une tristesse et d’une beauté mêlées d’une puissance dévastatrice. Inexistante au début du film, elle prend de l’ampleur a fur et à mesure que la tragédie se rapproche et qu’elle devient inéluctable, sans jamais être trop grandiloquente ou omniprésente.

     

    Certains plans sont d’une beauté à couper le souffle, comme ces requins en contre-plongée qui semblent danser, le défier et l’accompagner ou comme cette fin qui mélange les éléments, l’eau et le feu, le rêve et la réalité ou encore cette lune braquée sur lui comme un projecteur.

     

     Comme l’a souligné Robert Redford, il s’agit d’un « film presque existentiel qui laisse la place à l’interprétation du spectateur » et cela fait un bien fou de « regarder quelqu’un penser » pour reprendre les termes du producteur même si cette définition pourrait donner une image statique du film qui se suit au contraire comme un thriller.

     

    En conférence de presse, Robert Redford avait révélé ne pas avoir vu le film et qu’il allait le découvrir le même soir lors de la projection officielle cannoise dans le Grand Théâtre Lumière. On imagine aisément son émotion, à l’issue de cette heure quarante. Face à lui-même. Face à cette fable bouleversante d’une beauté crépusculaire

     

     All is lost a été présenté hors compétition du 66ème Festival de Cannes. Il aurait indéniablement eu sa place en compétition et peut-être même tout en haut du palmarès

  • "Robot & Frank" remplace "Mud" en ouverture du 38ème Festival du Cinéma Américain de Deauville

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    C'est finalement un film en compétition qui fera l'ouverture de ce Festival du Cinéma Américain de Deauville 2012: le très attendu "Robot and Frank" de Jake Schreier, "Mud" de Jeff Nichols (réalisateur de "Take shelter", grand prix du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2011), le film en avant-première initialement annoncé comme film d'ouverture ayant apparemment été déprogrammé (à confirmer), finalement une bonne idée puisque cela inscrit davantage encore (si besoin était) le festival comme vitrine du cinéma indépendant américain.

    Cliquez ici pour retrouver mon article sur le programme complet et commenté du 38ème Festival du Cinéma Américain de Deauville.

  • Festival du Cinéma Américain de Deauville 2012 : "Wrong" de Quentin Dupieux, un nouveau film en compétition

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    Un 15ème film vient de s'ajouter à la liste des films en compétition du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2012 venat compléter une programmation déjà fort riche et diversifiée ( vous pouvez retrouver le programme complet du festival en cliquant ici) : "Wrong" de Quentin Dupieux.

    Synopsis: Dolph a perdu son chien, Paul.
    Le mystérieux Master Chang pourrait en être la cause. Le détective Ronnie, la solution.
    Emma, la vendeuse de pizzas, serait un remède, et son jardinier, une diversion?
    Ou le contraire. Car Paul est parti, et Dolph a perdu la tête.

    Sortie en salles : le 5 septembre 2012

     

  • "Compliance" de Craig Zobel en compétition officielle du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2012

    Compliance : affiche

    C'est tout simplement l'affiche du film (ci-dessus) qui nous apporte cette information "Compliance" qui a fait sensation au dernier Festival de Sundance sera ainsi en compétition du prochain Festival du Cinéma Américain de Deauville.

    Casting: Ann Dowd, Dreama Walker, Pat Healy...

    Synopsis: Lors d’une journée particulièrement chargée, Sandra, gérante d’un fast-food d’une banlieue de l’Ohio reçoit l’appel d’un policier accusant l’une de ses employés d’avoir volé un client. Le croyant sur parole, Sandra place Becky sous surveillance, entrant ainsi dans une situation qui va bientôt tous les dépasser.

  • Quatrième et cinquième journées « in the mood for Deauville » : compétition, hommages, premières…

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    C’est déjà mon sixième jour de présence à Deauville et le temps et les séances et les souvenirs s’égrènent si vite que je n’ai pas eu le temps de vous résumer ces deux derniers jours.

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     Pas encore d’énorme coup de cœur cinématographique mais une compétition qui révèle un niveau élevé et des premiers films de qualité…mais Deauville ce sont aussi les Premières à commencer par celle de « Drive » de Nicolas Winding Refn, prix de la mise en scène du dernier Festival de Cannes qui avait créé l’évènement sur la Croisette où je l’avais manqué. Drive est l'adaptation du livre éponyme écrit par James Sallis et c’est  le scénariste Hossein Amini qui a  transformé le roman en scénario. C’est l’histoire d’un jeune homme solitaire, "The Driver",  qui conduit le jour à Hollywood pour le cinéma en tant que cascadeur et la nuit pour des truands. Il a pour « principe » de ne pas participer aux crimes de ses employeurs qu’en conduisant et de n’être jamais armé. Sa  route croise celle d’Irene et de son jeune fils, ses voisins, et il succombe rapidement au charme de l’un et l’autre, et réciproquement. Lorsque le mari d’Irene sort de prison et se retrouve enrôlé de force dans un braquage pour s’acquitter d’une dette, il décide pourtant de lui venir en aide. L’expédition tourne mal… Doublé par ses commanditaires, et obsédé par les risques qui pèsent sur Irene, il n’a dès lors pas d’autre alternative que de les traquer un à un…

    Cela commence sur les chapeaux de roue : une mise en scène époustouflante, flamboyante et crépusculaire, qui nous fait ressentir les sensations trépidantes, périlleuses et vertigineuses de ce chauffeur hors pair et  mutique, au sourire retenu, dans une ville de Los Angeles tentaculaire, éblouissante et menaçante. Mais « The Driver » porte un masque, au propre comme au figuré (symbolisme un peu simpliste) et derrière ce chauffeur mutique d’allure plutôt sympathique va se révéler un vengeur impitoyable pour protéger ceux qu’il « aime ». La violence psychologique s’annonce palpitante : pris dans un étau, il n’a d’autre solution que de commettre un méfait pour le mari d’Irène, pour sauver celle-ci … malheureusement ce qui dans la première partie s’annonçait comme un film à suspense se transforme en règlement de compte sanguinolent dans lequel l’intrigue devient inexistante et simple prétexte à une suite de scènes sanglantes, invraisemblables et vaines. Là où un cinéaste comme James Gray (qui lui aussi sublime une ville, en l’occurrence New York, traite de vengeance et d’amour, sans jamais mettre le scénario de côté, ou sans qu’un de ces aspects prennent le pas sur les autres), Nicolas Winding Refn se laisse entraîner par une sorte de fascination pour la violence (me rappelant ainsi la phrase de Coppola lors de sa master class samedi « Montrer la guerre c’est déjà faire l’éloge de la guerre »), montrant pourtant le temps d’un meurtre sur la plage qu’il savait très bien filmer la mort, avec une force prenante, sans que cela tourne à la boucherie ridicule. Ryan Gosling est époustouflant et derrière sa gueule d’ange dissimule une violence froide, il se transforme en un vengeur impitoyable qu’il est pourtant difficile de prendre en sympathie ou même en empathie. Dommage, cette bo remarquable alliée à des scènes plus calmes d’une beauté saisissante (face-à-face dans son appartement entre Irène et The Driver dans laquelle le temps est suspendu et dans laquelle les échanges évasifs de regards et les silences d’une douce sensualité en disent tellement). Nicolas Winding Refn a ravi le prix de la mise en scène à Pedro Almodovar à Cannes qui, à mon avis, l’aurait davantage mérité, ne serait-ce parce qu’il a brillamment raconté une histoire cruelle, terrible, effroyable où toute la finesse de la mise en scène réside justement dans ce qui n’est pas montré et qui n’en a que plus de force…

    Deauville, depuis 1995, c’est aussi et avant tout la compétition. Si les spectateurs sont moins nombreux sans doute déçus de l’absence de ceux qui étaient les incontournables de Deauville (stars et blockbusters même si le générique reste prestigieux cette année avec, comme toujours des mythes du cinéma américain, des grands cinéastes et les figures montantes du cinéma américian) , le festival continue de ravir les cinéphiles avec une compétition qui, chaque année, révèle de nouveaux talents, mais aussi une facette de l’Amérique, souvent plus sombre et réaliste. Pour ces différents aspects, cette édition ne devrait pas déroger à la règle, les quatre films de la compétition auxquels j’ai assisté pour l’instant, d’ailleurs tous des premiers films, ayant de nombreux points communs, à commencer par une qualité notable.

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    « Another happy day » de Sam Levinson –fils d’un certain Barry-  (avec Ellen Barkin, Ezra Miller, Kate Bosworth, Demi Moore, Thomas Haden Church, George Kennedy, Ellen Burstyn) est ainsi une comédie acide et parfois tendrement cruelle (tendrement parce que Sam Levinson porte un regard finalement plein de compréhension sur ses personnages sans toutefois les épargner) dans laquelle un mariage devient le révélateur des rancœurs et des fêlures des différents membres d’une famille.

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    Dans « En secret » (Circumstance) de Maryam Keshavarz, Atafeh et sa meilleure amie Shireen fréquentent les soirées branchées du Téhéran underground. Elles essaient de profiter au mieux de leur jeunesse quand Mehran, le frère et complice d’Atafeh, devient membre de la police des moeurs. Alors qu’il désapprouve sévèrement leur besoin de liberté, Mehran tombe amoureux de Shireen. Ses sentiments vont vite tourner à l’obsession et mettre à l’épreuve l’amitié des jeunes filles.

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     Dans « On the ice » d’Andrew Okpeaha MacLean, Qalli et Aivaaq, deux adolescents de la communauté Iñupiaq, mènent une vie sans histoire dans une petite ville isolée du nord de l’Alaska. Un matin tôt, ils décident de partir à la chasse aux phoques avec James, un de leurs amis. Une dispute éclate entre les trois garçons et se termine par la mort accidentelle de James. Liés par ce sombre secret, les deux adolescents inventent mensonges sur mensonges afin de ne pas éveiller les soupçons de leur communauté.

    Enfin dans « Yelling to the sky » de Victoria Mahoney, alors que son noyau familial se disloque, l’existence déjà instable de Sweetness O’Hara, une adolescente métisse de dix-sept ans, devient encore plus difficile le jour où elle est prise pour cible par des élèves violents de son lycée. Elle doit dorénavant trouver le meilleur moyen de se défendre et prendre sa vie en main, chez elle, comme à l’école, dans un quartier où sa survie semble incertaine.

    Si j’ai choisi de vous parler de ces quatre films en même temps, c’est parce que leurs ressemblances sont particulièrement frappantes, au-delà du fait qu’il s’agit de quatre premiers films. Quatre premiers films qui se déroulent pourtant dans des lieux très différents, voire opposés : Téhéran, l’Alaska, New York (Long Island), le Maryland. Dans ces quatre lieux, où les paysages et libertés sont pourtant si différents, on retrouve pourtant le même mal être adolescent, les mêmes personnages de mères désemparées, le même sentiment de réalité suffocante à laquelle ils cherchent des échappatoires périlleux et parfois illicites, le même besoin éperdu et rageur de liberté.

     Que cela soit traité avec un cynisme tantôt amer, tantôt tendre (« Another happy day »), avec une rigueur glaciale et non moins touchante (« On the ice »), avec une mise en scène parfois un peu trop clipesque (« En secret ») ou avec le souci de mettre en scène une réalité dans laquelle la violence est un engrenage implacable pour survivre (« Yelling to the sky »), ces adolescents en apparence si différents révèlent la même réalité étouffante, le même besoin d’ailleurs et d’appui familial, les mêmes personnages de mères broyées ou désemparées qui ont parfois renoncé.

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    Malheureusement, tous présentent aussi le même défaut : un dénouement assez expéditif (un changement d’attitude du père assez inexplicable dans « Yelling to the sky ») un scénario qui s’essouffle vers la fin comme si ces cinéastes s’adonnaient à ce dont ne cessent de rêver leurs personnages pendant toute la durée de leurs films : la fuite. Manière finalement peut-être plus consciente et habile qu’il n’y paraît de faire coïncider la forme et le fond. « Another happy day » a récolté l’accueil le plus chaleureux. Il faut dire que son réalisateur qui rêvait de venir en France, et amoureux du cinéma français (et cela se ressent, avec une pointe d’influence « Woodyallenienne » sans évidemment, arriver encore au même niveau de causticité), était particulièrement ému lorsqu’il a présenté le film devant les festivaliers sur la scène du CID. Sans doute, à 26 ans, a-t-il pas mal vécu (et souffert) pour éprouver et faire ressentir les tourments de cette famille presque aussi perturbée que celle du splendide « Melancholia » de Lars Von Trier (dans les deux cas, d’ailleurs le mariage en est le révèlateur). Dommage que « En secret » reste conventionnel, et pâtisse de films remarquables sur Téhéran qui l’ont précédé comme le film éponyme de Nader T.Homayoun (à voir absolument d’ailleurs).

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    Quatre films à voir néanmoins, et je vous en reparlerai à l’occasion du palmarès.  Deauville ce sont bien sûr aussi les hommages. Si Ryan Gosling et Jessica Chastain, qui recevaient les trophées du Nouvel Hollywood dont Deauville inaugurait la première édition, ont malheureusement brillé par leur absence (même si Ryan Gosling a laissé un mot lu par Nicolas Winding Refn, très drôle, dont je mettrai ultérieurement la vidéo en ligne), Shirley MacLaine a en revanche fait une apparition remarqué et remarquable et un très beau discours dont vous pourrez retrouver la majeure partie ci-dessous, visiblement réellement heureuse de recevoir cette distinction consacrant sa longue carrière. C’est « Le tournant de la vie » (« The Turning point »), un film de 1977 de Herbert Ross qui a été projeté pour cet hommage dans lequel elle incarne une ancienne danseuse qui se retrouve confrontée à son passé et au fait d’avoir abandonné sa carrière pour fonder une famille. Un parfait complément au film de clôture (« The Artist ») sur l’orgueil ravageur, les douleurs indicibles, les bonheurs éclatants, l’ingratitude de la vie d’artiste.

    Je vous parlerai ultérieurement de « Bringing up Bobby », le premier film en tant que réalisatrice de l’actrice, Famke Janssen avec Milla Jovovich, Bill Pullman, qui dénote un univers tendre et fantaisiste particulièrement prometteur.

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